Lettre écrite en prison en décembre 1960 à sa
femme Pauline.
Ma
compagne chérie,
Je t’écris ces mots sans savoir s’ils te
parviendront, quand ils te parviendront et si je
serai en vie lorsque tu les liras. Tout au long de ma lutte pour l’indépendance de mon pays, je n’ai jamais douté un seul instant du triomphe final de la cause sacrée à laquelle mes compagnons et moi avons consacré toute notre vie. Mais ce que nous voulions pour notre pays, son droit à une vie honorable, à une dignité sans
tache, à une indépendance sans restrictions, le
colonialisme belge et ses alliés occidentaux -
qui ont trouvé des soutiens directs et indirects,
délibérés et non délibérés, parmi certains hauts
fonctionnaires des Nations-unies, cet organisme en qui nous avons placé toute notre confiance lorsque nous avons fait appel à son assistance - ne l’ont jamais voulu. Ils ont corrompu certains de nos compatriotes, ils ont contribué à déformer la vérité et à souiller notre indépendance.
Que pourrai-je dire d’autre ?
Que mort, vivant, libre ou en prison sur ordre
des colonialistes, ce n’est pas ma personne
qui compte. C’est le Congo, c’est notre
pauvre peuple dont on a transformé
l’indépendance en une cage d’où l’on
nous regarde du dehors, tantôt avec cette
compassion bénévole, tantôt avec joie et plaisir.
Mais ma foi restera inébranlable. Je sais et je
sens au fond de moi même que tôt ou tard mon
peuple se débarrassera de tous ses ennemis
intérieurs et extérieurs, qu’il se lèvera comme
un seul homme pour dire non au capitalisme
dégradant et honteux, et pour reprendre sa
dignité sous un soleil pur.
Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie
et les peuples libres et libérés de tous les coins
du monde se trouveront toujours aux côtés de
millions de congolais qui n’abandonneront la
lutte que le jour où il n’y aura plus de
colonisateurs et leurs mercenaires dans notre
pays. A mes enfants que je laisse, et que peut-
être je ne reverrai plus, je veux qu’on dise
que l’avenir du Congo est beau et qu’il
attend d’eux, comme il attend de chaque
Congolais, d’accomplir la tâche sacrée de la
reconstruction de notre indépendance et de
notre souveraineté, car sans dignité il n’y a
pas de liberté, sans justice il n’y a pas de
dignité, et sans indépendance il n’y a pas
d’hommes libres.
Ni brutalités, ni sévices, ni tortures ne m’ont
jamais amené à demander la grâce, car je
préfère mourir la tête haute, la foi inébranlable
et la confiance profonde dans la destinée de
mon pays, plutôt que vivre dans la soumission
et le mépris des principes sacrés. L’histoire
dira un jour son mot, mais ce ne sera pas
l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles,
Washington, Paris ou aux Nations Unies, mais
celle qu’on enseignera dans les pays
affranchis du colonialisme et de ses fantoches.
L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera
au nord et au sud du Sahara une histoire de
gloire et de dignité. Ne me pleure pas, ma
compagne. Moi je sais que mon pays, qui souffre tant, saura défendre son indépendance et sa liberté. Vive le Congo ! Vive l’Afrique ! »
Je t’écris ces mots sans savoir s’ils te
parviendront, quand ils te parviendront et si je
serai en vie lorsque tu les liras. Tout au long de ma lutte pour l’indépendance de mon pays, je n’ai jamais douté un seul instant du triomphe final de la cause sacrée à laquelle mes compagnons et moi avons consacré toute notre vie. Mais ce que nous voulions pour notre pays, son droit à une vie honorable, à une dignité sans
tache, à une indépendance sans restrictions, le
colonialisme belge et ses alliés occidentaux -
qui ont trouvé des soutiens directs et indirects,
délibérés et non délibérés, parmi certains hauts
fonctionnaires des Nations-unies, cet organisme en qui nous avons placé toute notre confiance lorsque nous avons fait appel à son assistance - ne l’ont jamais voulu. Ils ont corrompu certains de nos compatriotes, ils ont contribué à déformer la vérité et à souiller notre indépendance.
Que pourrai-je dire d’autre ?
Que mort, vivant, libre ou en prison sur ordre
des colonialistes, ce n’est pas ma personne
qui compte. C’est le Congo, c’est notre
pauvre peuple dont on a transformé
l’indépendance en une cage d’où l’on
nous regarde du dehors, tantôt avec cette
compassion bénévole, tantôt avec joie et plaisir.
Mais ma foi restera inébranlable. Je sais et je
sens au fond de moi même que tôt ou tard mon
peuple se débarrassera de tous ses ennemis
intérieurs et extérieurs, qu’il se lèvera comme
un seul homme pour dire non au capitalisme
dégradant et honteux, et pour reprendre sa
dignité sous un soleil pur.
Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie
et les peuples libres et libérés de tous les coins
du monde se trouveront toujours aux côtés de
millions de congolais qui n’abandonneront la
lutte que le jour où il n’y aura plus de
colonisateurs et leurs mercenaires dans notre
pays. A mes enfants que je laisse, et que peut-
être je ne reverrai plus, je veux qu’on dise
que l’avenir du Congo est beau et qu’il
attend d’eux, comme il attend de chaque
Congolais, d’accomplir la tâche sacrée de la
reconstruction de notre indépendance et de
notre souveraineté, car sans dignité il n’y a
pas de liberté, sans justice il n’y a pas de
dignité, et sans indépendance il n’y a pas
d’hommes libres.
Ni brutalités, ni sévices, ni tortures ne m’ont
jamais amené à demander la grâce, car je
préfère mourir la tête haute, la foi inébranlable
et la confiance profonde dans la destinée de
mon pays, plutôt que vivre dans la soumission
et le mépris des principes sacrés. L’histoire
dira un jour son mot, mais ce ne sera pas
l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles,
Washington, Paris ou aux Nations Unies, mais
celle qu’on enseignera dans les pays
affranchis du colonialisme et de ses fantoches.
L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera
au nord et au sud du Sahara une histoire de
gloire et de dignité. Ne me pleure pas, ma
compagne. Moi je sais que mon pays, qui souffre tant, saura défendre son indépendance et sa liberté. Vive le Congo ! Vive l’Afrique ! »
Patrice Lumumba.
 

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